Monsieur Cuno, vous êtes spécialiste de la rhinoplastie.
Combien d’opérations avez-vous déjà effectué ? Qui sont les patients qui vous contactent pour se faire opérer le nez ?
Je ne compte pas, j’ai probablement fait autour de 700 - 900 interventions nasales. Je fais environ 4 rhinoplasties par semaine en moyenne, le volume augmente régulièrement. Le plus grand nombre sont des demandes fonctionnelles, ensuite il y a beaucoup de demandes esthétiques. Les patients sont souvent adressés par des collègues ORL et on opère souvent ensemble. J’opère surtout avec mon collègue Dr. Arnaud Tripet, on fait la majorité des nez ensemble. La rhinoplastie sert à diminuer/améliorer la forme du nez.
Est-ce qu’il y a encore d’autres types d’opérations du nez que vous proposez à vos patients ?
A part des rhinoplasties esthétiques, on fait de la rhinoplastie fonctionnelle avec réparation des valves nasales. Un problème de valve est souvent sous-diagnostiqué et pourtant c’est l’endroit le plus étroit du passage respiratoire nasal.
On fait de plus en plus de révisions de patients qui se sont fait opérer ailleurs et qui ont soit des difficultés respiratoires ou des plaintes esthétiques. On enlève souvent des cancers de la peau du visage et du nez, puis on reconstruit les défects minutieusement. On fait des fermetures de perforations septales et des reconstructions nasales. Sinon, on fait aussi beaucoup de chirurgie endonasale pour améliorer la respiration, la chirurgie des sinus, la chirurgie des voies lacrymales par voie endonasale et on enlève parfois des tumeurs.
Pourriez-vous expliquer la différence entre la rhinoplastie et la rhinoseptoplastie ?
Le terme rhinoseptoplastie sous-entend qu’on va corriger une déformation/déviation septale en même temps qu’on modifie la forme extérieure du nez. En réalité, on va souvent chercher du cartilage dans la cloison nasale pour beaucoup des rhinoplasties esthétiques, même s’il ne faut pas une correction septale.
Au niveau du nez, forme et fonction sont intimement liés. Tout changement de forme peut avoir une répercussion fonctionnelle, que ce soit à court ou à moyen terme. Donc on change rarement que la forme sans restabiliser le tout avec des sutures et des greffons.
Quelles sont les indications pour une rhinoseptoplastie ? Quelles sont les souffrances des patients qui souhaitent subir une rhinoseptoplastie ?
Il peut s’agir de déviations nasales congénitales ou post-traumatiques. On essaye de créer une nouvelle forme nasale ou de restaurer la forme antérieure. Il y a parfois indication d’une rhinoplastie fonctionnelle pour certaines formes d’obstruction nasale. Alors on fait une septorhinoplastie ce qui peut impliquer stabiliser/ouvrir les valves ou rectifier le nez.
Sinon, il y a des indications de révision post-opératoire. Après des rhinoplasties esthétiques on peut voir apparaître des imperfections au fil du temps. Ils peuvent avoir une répercussion respiratoire avec collapsus nasal. Le nez devient non fonctionnel. Dans ce cadre on manque souvent de cartilage septal pour pouvoir restaurer la forme, qu’on doit alors prélever au niveau des oreilles ou au niveau des côtes.
Comment une rhinoseptoplastie se déroule-t-elle ? Quel est le régime post-opératoire après une rhinoseptoplastie ?
Avant le geste on fait toujours une endoscopie nasale complète avec analyse fonctionnelle, on fait des photos standardisées et un morphing 3D du nez et du visage. Parfois on discute alors avec le patient d’autres régions anatomiques pour obtenir une meilleure harmonie faciale, comme le menton et le front.
L’intervention se fait sous anesthésie générale et peut durer une à plusieurs heures. Parfois il faut prélever du fascia au niveau de la tempe pour les patients avec des peaux fines. En cas de manque de cartilage pour des greffons on est parfois amené à prélever du cartilage au niveau des oreilles ou au niveau des côtes.
En post-opératoire on suit le patient de près et le suivi est important pour le résultat final. Souvent il y a des mèches qu’on enlève à 48 heures. L’attelle et les fils sont enlevées à 7 jours. Ensuite, il y a des contrôles à 6 semaines, 3 mois, 6 mois et à un an.
Une anesthésie générale, est-elle toujours nécessaire dans le cas de la rhinoplastie ?
On ne fait pas de rhinoplasties sous anesthésie locale (avec ou sans sédation) car il y a un risque d’aspiration accidentelle de sang dans les poumons. Deuxièmement, le nez est un organe qui peut déclencher multiples réflexes végétatifs, ce qui peut rendre l’intervention inconfortable. Il y a des exceptions pour des petites rhinoplasties de révision.
Est-ce qu’il existe une possibilité d’effectuer une rhinoplastie sans opération ? Existe-il des méthodes non invasives ?
On peut changer la forme du nez avec des injections. Pas tous les nez sont candidats, en général on fait un morphing 3D préalable, ce qui permet au patient de voir ce qu’on arrive à faire.
On peut augmenter le volume du nez avec l’acide hyaluronique ce qui permet de camoufler des imperfections. Pour modifier la forme une à plusieurs séances sont nécessaires. Ce n’est pas un geste anodin, il y a des rares risques potentiels à discuter lors de la consultation. Le produit utilisé doit toujours être résorbable. La toxine botulique permet également de relâcher certains muscles autour du nez, ce qui permet parfois d’améliorer la forme.
Faut-il souvent faire une réoperation, c’est-à-dire une rhinoplastie secondaire ?
Le risque d’une révision dans la littérature est autour de 5-15%. Le risque augmente avec le nombre d’interventions nasales faites. La rhinoplastie reste une intervention très délicate et difficile. Le résultat dépend de la technique opératoire, mais également du processus de guérison du patient et de la qualité de sa peau. On ne contrôle pas toujours tous les aspects. Le plus souvent il s’agit de petites imperfections. Parfois se sont des réparations pour corriger des troubles fonctionnelles apparues suite à une rhinoplastie effectuée bien longtemps avant.
Dans quels cas refusez-vous de faire une rhinoplastie ou bien une rhinoplastie secondaire ?
Il faut avoir une bonne entente et relation avec le patient, car toute rhinoplastie implique une phase de préparation au geste, l’intervention, puis un suivi post-opératoire. Il faut que le patient ait des attentes réalistes. On cherche toujours à améliorer le nez, mais la perfection n’est pas toujours atteignable. Si le patient est trop détaillé dans sa demande, ça peut représenter un drapeau rouge. Je ne fais que des modifications que j’aime bien d’un point de vue esthétique, je ne répond pas à des demandes extraordinaires.
Quand il y a une préoccupation obsessive sur la forme du nez et si cette déformation est minime je me méfie. Les consultations per-opératoires sont cruciales. On fait des morphings en 3D en pré-opératoire ce qui est un outil de communication formidable entre le patient et le chirurgien. Comme ça le patient voit ce qui est réalisable et ce qui n’est pas faisable. Finalement, chaque chirurgien doit connaître ses propres limites. Quand je pense que je ne peux pas obtenir un résultat satisfaisant alors je renonce.
mise à jour: 10.12.2018